Neil Young
Paris [AccorHotels Arena] - jeudi 23 juin 2016 |
Comment décrire un concert de près de trois heures par un artiste qui a cinquante ans de carrière derrière lui et dont on possède une quinzaine d'albums, sans se perdre dans les méandres de la setlist ? J'ai choisi de chipoter, d'une part parce que je suis un vieil indie-rocker blasé et sectaire, et d'autre part parce que des trois concerts de Neil Young que j'ai eu la chance de voir, c'est celui qui – relativement - m'a procuré le moins d'émotions.
Évoquons tout d'abord le contexte défavorable de cette tournée française 2016, en plein Euro de foot et en plein état d'urgence, et de ce concert parisien qui part avec un handicap non négligeable étant donné l'âge moyen du public (sans parler de l'âge du performer) : une vague de chaleur s'abat depuis deux jours sur la France après un automne/printemps pluvieux de près de huit mois. Repliés à la terrasse ombragée d'une pizzeria voisine de l'AccorHotels Arena (je ne me ferai jamais à ce nom), puis retardés par la file d'attente pour l'accès à la fosse (le message est clair : les pauvres peuvent attendre), nous arrivons au moment où Neil entonne "Heart of gold" avec sa vieille guitare folk élimée. Pendant que nous remontons péniblement vers le milieu de la fosse, il enchaîne avec "The Needle And The Damage Done", sans doute l'une des chansons les plus complexes que j'aie jamais su jouer à peu près correctement à la guitare. Aïe aïe aïe, se dit l'indie-rocker, deux des chansons les plus connues de son best-seller Harvest, ça sent le concert bestove. Heureusement, la suivante est issue de son répertoire Crazy Horse : la poignante "Comes A Time", suivie d'un très beau "Mother Earth" qu'il interprète sur un vieil orgue aussi usé que sa guitare.
Puis commence le "moment Monsanto" que je redoutais un peu, tant notre ami est remonté contre cette firme depuis quelques temps (je le suis aussi, mais je ne vais pas pour autant le manifester sur mon lieu de travail) : des types en combinaison de protection aspergent des torrents de fumée blanche sur la scène, suggérant un épandage de pesticides. On en reste là, ce n'est pas plus mal. Depuis les roadies Jawas de la tournée Rust Never Sleeps en 79 jusqu'aux infirmières de sa dernière tournée avec Crazy Horse, il nous a habitués à ce genre de facéties scéniques de plus ou moins bon goût ; c'est aussi pour son humour qu'on l'aime, papy Neil. Pendant ce temps, ses jeunots d'acolytes se sont installés et l'ensemble enchaîne deux autres chansons de Harvest, "Out On The Weekend" puis "Old Man" ; on aura droit également à "Alabama" et "Words". Toutes ces chansons sont magnifiques, mais le rythme est un peu pépère, et la chaleur commence à peser sur les organismes. Pour ne rien arranger, des problèmes techniques rendent les transitions poussives, et le public finit manifester un peu de frustration. Le grand monsieur sait alors trouver le ton et les mots justes (en anglais) : "on est dans le même bateau, on devrait travailler ensemble plutôt que de se diviser".
Une autre surprise nous attend : Lukas Nelson, fils de Willie et guitariste et leader du groupe Promise Of The Real qui accompagne le loner sur le dernier album et sur cette tournée, s'installe au piano et commence à chanter dans une langue curieuse. On reconnaît assez vite "La Vie En Rose", que le reste du groupe - y compris Neil Young - accompagne dans une version jazzy-laidback pas désagréable. Cela dit, on attend toujours que la petite bande passe la vitesse supérieure. Il faut attendre 22 heures pour que le loner déterre la Les Paul de guerre. Elle aussi a de la bouteille, avec son revêtement creusé par les millions de coups de médiator rageurs que lui a assénés son propriétaire. Il enchaîne deux morceaux de l'excellent album Ragged Glory : une version de 25 minutes du magnifique "Love To Burn", puis "Mansion On The Hill", avant de revenir à des morceaux plus calmes. J'ai tout de même droit à quelques morceaux que j'adore comme "Vampire Blues", "Country Home" - qui sera l'occasion d'un hommage aux fermes françaises "préservées depuis des siècles" (sic) - et "Everybody Knows This Is Nowhere", mais cette setlist est assez déroutante ; je me rends compte que je ne suis pas tant fan de Neil Young que de Neil Young & Crazy Horse.
Le concert se termine avec une version enflammée de "Rockin' In A Free World" (que des esprits perfides appellent désormais "la chanson de Donald Trump"), une belle conclusion avant la sortie de scène. Après d'interminables d'applaudissements, le groupe revient avec un saladier plein de cerises (des "psychedelic cherries from France"), avant d'interpréter une version Santana-grunge d'un quart d'heure de "Like An Inca" (que j'ai confondue avec le très beau "Hitchhiker" de l'album Le Noise). Il faut dire que le groupe compte un percussionniste, probablement ramassé sur la route pendant la fête de la musique, en même temps que les cerises. Au final, un concert inégal mais loin d'être honteux. Le Loner a beau être bouffi et un peu voûté, il garde toute sa tête, et même si le rythme est un peu plus lent, ça reste un beau moment de musique et de partage.
Évoquons tout d'abord le contexte défavorable de cette tournée française 2016, en plein Euro de foot et en plein état d'urgence, et de ce concert parisien qui part avec un handicap non négligeable étant donné l'âge moyen du public (sans parler de l'âge du performer) : une vague de chaleur s'abat depuis deux jours sur la France après un automne/printemps pluvieux de près de huit mois. Repliés à la terrasse ombragée d'une pizzeria voisine de l'AccorHotels Arena (je ne me ferai jamais à ce nom), puis retardés par la file d'attente pour l'accès à la fosse (le message est clair : les pauvres peuvent attendre), nous arrivons au moment où Neil entonne "Heart of gold" avec sa vieille guitare folk élimée. Pendant que nous remontons péniblement vers le milieu de la fosse, il enchaîne avec "The Needle And The Damage Done", sans doute l'une des chansons les plus complexes que j'aie jamais su jouer à peu près correctement à la guitare. Aïe aïe aïe, se dit l'indie-rocker, deux des chansons les plus connues de son best-seller Harvest, ça sent le concert bestove. Heureusement, la suivante est issue de son répertoire Crazy Horse : la poignante "Comes A Time", suivie d'un très beau "Mother Earth" qu'il interprète sur un vieil orgue aussi usé que sa guitare.
Puis commence le "moment Monsanto" que je redoutais un peu, tant notre ami est remonté contre cette firme depuis quelques temps (je le suis aussi, mais je ne vais pas pour autant le manifester sur mon lieu de travail) : des types en combinaison de protection aspergent des torrents de fumée blanche sur la scène, suggérant un épandage de pesticides. On en reste là, ce n'est pas plus mal. Depuis les roadies Jawas de la tournée Rust Never Sleeps en 79 jusqu'aux infirmières de sa dernière tournée avec Crazy Horse, il nous a habitués à ce genre de facéties scéniques de plus ou moins bon goût ; c'est aussi pour son humour qu'on l'aime, papy Neil. Pendant ce temps, ses jeunots d'acolytes se sont installés et l'ensemble enchaîne deux autres chansons de Harvest, "Out On The Weekend" puis "Old Man" ; on aura droit également à "Alabama" et "Words". Toutes ces chansons sont magnifiques, mais le rythme est un peu pépère, et la chaleur commence à peser sur les organismes. Pour ne rien arranger, des problèmes techniques rendent les transitions poussives, et le public finit manifester un peu de frustration. Le grand monsieur sait alors trouver le ton et les mots justes (en anglais) : "on est dans le même bateau, on devrait travailler ensemble plutôt que de se diviser".
Une autre surprise nous attend : Lukas Nelson, fils de Willie et guitariste et leader du groupe Promise Of The Real qui accompagne le loner sur le dernier album et sur cette tournée, s'installe au piano et commence à chanter dans une langue curieuse. On reconnaît assez vite "La Vie En Rose", que le reste du groupe - y compris Neil Young - accompagne dans une version jazzy-laidback pas désagréable. Cela dit, on attend toujours que la petite bande passe la vitesse supérieure. Il faut attendre 22 heures pour que le loner déterre la Les Paul de guerre. Elle aussi a de la bouteille, avec son revêtement creusé par les millions de coups de médiator rageurs que lui a assénés son propriétaire. Il enchaîne deux morceaux de l'excellent album Ragged Glory : une version de 25 minutes du magnifique "Love To Burn", puis "Mansion On The Hill", avant de revenir à des morceaux plus calmes. J'ai tout de même droit à quelques morceaux que j'adore comme "Vampire Blues", "Country Home" - qui sera l'occasion d'un hommage aux fermes françaises "préservées depuis des siècles" (sic) - et "Everybody Knows This Is Nowhere", mais cette setlist est assez déroutante ; je me rends compte que je ne suis pas tant fan de Neil Young que de Neil Young & Crazy Horse.
Le concert se termine avec une version enflammée de "Rockin' In A Free World" (que des esprits perfides appellent désormais "la chanson de Donald Trump"), une belle conclusion avant la sortie de scène. Après d'interminables d'applaudissements, le groupe revient avec un saladier plein de cerises (des "psychedelic cherries from France"), avant d'interpréter une version Santana-grunge d'un quart d'heure de "Like An Inca" (que j'ai confondue avec le très beau "Hitchhiker" de l'album Le Noise). Il faut dire que le groupe compte un percussionniste, probablement ramassé sur la route pendant la fête de la musique, en même temps que les cerises. Au final, un concert inégal mais loin d'être honteux. Le Loner a beau être bouffi et un peu voûté, il garde toute sa tête, et même si le rythme est un peu plus lent, ça reste un beau moment de musique et de partage.
Bon 15/20 | par Myfriendgoo |
En ligne
331 invités et 0 membre
Au hasard Balthazar
Sondages