Depeche Mode

Delta Machine

Delta Machine

 Label :     Sony 
 Sortie :    lundi 25 mars 2013 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

D.M. pour Depeche Mode (ou Daniel Miller ou Dave/Martin?) et pour "Delta Machine"... Voici enfin la cuvée 2013 du groupe de Basildon. Annoncé fin 2012 comme un mélange de Violator et de Songs of Faith and Devotion par Martin Gore himself, la première chanson à être dévoilée, "Angel" reprenait déjà dans son moment le plus accrocheur un décalque du riff d'"I feel you". Pas trop mal, surtout dans le chant de Gahan, convoquant Nick Cave à s'emparer de lui.
Puis vint la présentation de la liste des titres, qui par leurs noms, faisait un peu peur: "Welcome To My World", "Goodbye", pour les titres de début et de fin, laissaient présager des promesses plus que des authentiques coups de poing dans la gueule auditifs ("Welcome To My World" allait-il être un "World In My Eyes 2"?). Le déjà cité "Angel" allait-il être une référence à Playing The Angel? "My Little Universe" à Sounds Of The Universe? Merde. L'album allait-il être uniquement un référentiel de la discographie du groupe, un mauvais best of déguisé en plagiat ? La peur monte d'un cran à la publication du single "Heaven", sirupeux, mielleux. O.K., les D.M. aiment surprendre mais vu déjà le mitigé Sounds Of The Universe, on avait toutes les raisons de croire que ça allait tourner au vinaigre.
L'album sort enfin. La presse est unanime en général : bon album, bien produit par Ben Hillier et bien mixé par Flood. "Un digne successeur de Violator" entend-t'on (on avait entendu ça pour Ultra, Exciter, Playing The Angel qui ont quand même chacun leur personnalité, sinon plus que le disque par lequel tout le monde connaît Depeche Mode). Puis on entend Martin and co. dire que Machine c'est pour leur côté électro, et que Delta c'est pour le blues (car toute la musique qu'ils aiment, elle vient de là, elle vient du blues...)
Les fans achètent quand même tous l'album et surtout l'édition avec le livret de Corbjin et les titres bonus (surtout pour ça). Parce que l'édition simple est dans un pauvre carton tout pourri, et que l'autre, plus solide, supportera le poids de tous les C.D. de Depeche Mode sortis depuis 1981 rangés juste au dessus dans votre étagère.

Après multiples écoutes, analyses, revirements, documentation depeche modienne, et tout le bordel, on peut déjà dire que Delta Machine sera plus consensuel que son prédécesseur. Mais soyons scolaires, classons les points négatifs, puis positifs, et enfin soyons synthétiques...

Points négatifs : Chaque compositeur dans une carrière trouve un jour son riff ultime. Martin Gore l'a trouvé en 1989, et il a écrit une chanson qui passe tout le temps sur RTL2 (je ferai une thèse sur cette radio un jour...). "Personal Jesus" que ça s'appelle. 3 ans plus tard il lui donne un petit frère plus rock, "I Feel You", puis un cousin détendu en 2001, "Dream On". Ce riff-péché originel, il l' a fait dans toutes les variations possibles, à travers les séquences électroniques de basse dans 60% des morceaux de D.M. depuis un moment.
Sur Delta Machine, il y a toute la famille de "Personal Jesus". "Soothe My Soul" est clairement le fils reconnu, "Goodbye", le grand-père dans le rocking chair et "Angel" est le neveu, puisqu'il est le fils d'"I Feel You".

Pour le reste, la chanson chantée par Gore, "The Child Inside" renvoie un peu à "Damaged People", en plus sobre, mais est trop classique, tandis qu'"Always" sur le cd bonus est beaucoup plus intéressante, car plus menaçante et contemplative.
Les paroles de Gahan (chacun se fera son opinion sur la signification du refrain de "Secret To The end"!) lestent ses refrains justement, notamment sur "Broken".
"Welcome To My World" aurait pu être traitée avec plus de puissance percussive sur son refrain, surtout avec les cordes qui accompagnent, mais certains apprécieront aussi la retenue.

Pour en arriver aux points positifs, la retenue est de mise ici, en réaction au gloubiboulga sonore de Sounds Of The Universe (qui vieillira peut être bien). "My Little Universe" démontre un minimalisme bienvenu, et colle très bien aux paroles: "Here I am king, I decide everything, I let no one in, no one", prononcé avec autorité et autant de solitude à double tranchant, tandis qu'un synthé menaçant arrive par une vague noire sur ce dernier "no one". plein de regrets... "Alone" est une autre grande chanson avec de bonnes paroles, typique de l'écriture Gore et très bien illustrée musicalement: "I saw you at your best, I knew you at your worst, I couldn't tell if you were blessed or cursed...". Il semble y avoir une colère, qui menace sans jamais exploser. Colère qui sombre dans le mystère, le renoncement et la mélancolie, derrière des poussées agressives technoïdes qui ne pulseront pas plus, un harmonium (ou un accordéon ou un truc entre les deux) fermant ce morceau dans une désolation figée et éloignée.
"Slow"est très sexy avec son blues de boîte à strip-tease. Un peu convenu, mais paroles et musiques se correspondent encore très bien. "That's how I like it..."Petit coquin, va...
"Should be higher" est LE morceau de Gahan: très bonne instrumentation, paroles un peu mieux que les deux autres et son chant explore des contrées aigues que nous avions rarement entendues. Bravo le Dave.
"Broken" recherche la dramaturgie de "Shake the Disease" en moins bien évidemment. L'intro est pourtant bonne, toute en tension dramatique et la guitare,entre Interpol et Placebo, donne une bouffée d'air frais à D.M., ça reste au correct au final.
"Secret to the end". Chacun se fera son avis... Les paroles qu'on peut comprendre en français vous permettront soit de détester le refrain (un leitmotiv plus qu'autre chose), soit d'explorer D.M. sous un angle nouveau, pourvu qu'on ait le sens de l'humour. Sur le plan musical, ça reste de bonne facture et Gahan réussit au final pas trop mal son coup sur les 3 morceaux qu'il propose.
"Soft Touch/Raw Nerve" est un petit peu poussif et aurait avoir un final plus en longueur (c'est là qu'il devenait intéressant, la fin étant plus un "break" qu'autre chose, ça coupe net genre :"on va couper net, ils vont pas s'y attendre car on est D.M. et surtout on n'a plus d'idées"). Le refrain reste dans la tête quand même là aussi.
Malgré leurs défauts, on se fait avoir comme des débutants sur "Angel" et "Soothe my soul", car très accrocheurs.

Pour synthétiser, on a une bonne production (mais s'ils continuent, ce serait bien qu'ils passent à autre chose après 3 albums avec Ben Hillier, il fait bien le job c'est sur, mais apporter un peu de sang frais ça fera du bien), 3-4 titres très cohérents et travaillés, quelques tubes, une daube ("Heaven"), un final inutile ("Goodbye"), et des morceaux entre deux eaux, futiles autant qu'agréables. Le disque bonus mérite aussi une attention particulière, de par ses morceaux moins évidents, mais "Always" reste très bon. Ce n'est que conjectures, mais "Long Time Lie" (la collaboration Gahan-Gore) ne serait-il pas un message adressé à ce glandeur de Fletcher ("It's been a long time since you did something"), le meilleur faux joueur de synthé du monde ("It's been a long time lie")? Dans la chanson, il semble qu'il y ait bel et bien un seul destinataire, tandis que le message émis passe d'une à deux personnes (on passe du "I" au "We"). Comme d'habitude, c'est laissé à libre interprétation (je ferai une thèse là-dessus un autre jour...).

On dira donc que Delta Machine est pour l'instant bien sympa. Ce qui lui ferait un 14,5. Comme c'est pas possible, mettons lui un 14, et on verra si le temps lui donnera plus.


Sympa   14/20
par Machete83


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