Shannon Wright
Toulouse [La Dynamo] - dimanche 14 novembre 2010 |
C'est avec une certaine appréhension que j'attendais la venue de Shannon Wright sur la petite scène de la Dynamo, en cette froide soirée de 2010. Un mot sur le lieu : petit café-concert faiblement éclairé, au plafond haut, avec balcon circulaire et une statue de la Vierge posée en hauteur sur l'un des murs. Un cadre à la fois intimiste et un peu mystique, peut-être le vestige d'un établissement religieux (un réfectoire ?), bien entamé par la bière, la sueur, les concerts. Endroit idéal pour passer un moment intime avec Shannon, que je suis depuis déjà un moment sans avoir eu encore l'occasion de la découvrir sur scène.
Derrière les trois musiciens, un écran projette la photo de trois personnes âgées, assises dans la semi-obscurité d'une maison de retraite. Manière de nous dire qu'on finit tous au même endroit, qui que l'on soit ? En tous cas, tout de noir vêtue, Shannon, accompagnée de deux garçons sobres et discrets à la basse et à la batterie, nous aura balancé en plein poire un set d'une tension quasiment insoutenable. Les concerts de Shannon Wright ont la réputation d'être particulièrement intenses. J'ai réalisé une chose ce soir là : le mot est faible.
Venue défendre son petit dernier Secret Blood, retour à un son plus agressif et torturé, Shannon ne lui fait pas forcément la part belle, et en profite pour faire remonter de son répertoire les morceaux les plus violents. Ainsi, les albums Dyed In The Wool et surtout l'inoubliable et difficile Over The Sun seront largement représentés. Shannon, possédée, manie sa guitare comme un hachoir, la batterie et la basse cognent dans l'estomac. Au milieu de cette aridité instrumentale, il y a cette voix, timide au début puis se frayant progressivement une place, s'imposant au fur et à mesure que la miss plonge dans sa musique comme dans une eau noire, oubliant peu à peu le regard du public.
Shannon est peu loquace sur scène, à peine un faible " merci " de temps en temps. Nous verrons très peu son visage. Comme rempart entre son âme, mélange de force et de pudeur, et nous, ses cheveux tombant devant son visage, lui donnant l'aspect d'un cousin Machin version grunge. Parfois (rarement), le nez dépasse, et puis surtout cette bouche immense, grande voûte où se libère la souffrance. Un concert de Shannon Wright est un exutoire. Il y a quelque chose de profondément dérangeant, ressenti parfois sur les disques, d'être de trop, d'avoir ouvert une porte et de rester comme hypnotisé face à un grand déballage de reliques douloureuses, qui finalement ne nous concernent pas et que l'on aurait jamais dû voir. Je me suis donc senti au départ de trop, malgré moi dans la position d'un voyeur, pris au piège. "Et les voyeurs qui payent pour voir un exhibitionniste, c'est petit", comme disait ce grand Desproges. Mais le besoin de tout lâcher est trop fort. Les dernières résistances finissent par tomber, devant cette identité si forte, devant cet affrontement sans complaisance de la part obscure qui nous habite tous. La miss, hagarde, se balance, chante à fleur de peau ou vomit son amertume, cambrée sur le micro, dans une attitude de défiance suicidaire. Le public, souvent immobile de stupeur, comme pris au piège d'un poison paralysant, se dégourdit parfois pour manifester se reconnaissance aux premiers accords entortillés et venimeux de "With Closed Eyes" ou se tait religieusement aux derniers souffles de "You'll Be The Death".
Seulement deux titres seront joués au clavier (son fameux Wurlitzer), dans un calme tout relatif, Shannon n'hésitant pas nous expédier un "Hinterland" secoué de rapides convulsions rageuses.
Comme je ne voulais pas perdre une miette du concert, et que mon vieil argentique gênait toute la foule autour de moi, très compacte, je n'ai pris qu'une seule photo, que je trouve très représentative de ce moment trouble et profondément marquant.
Le concert se termine par une longue ovation. C'est à ce moment là qu'un beau moment, beau dans l'éphémère, survient. Shannon nous regarde enfin, et nous adresse un grand sourire humble, la main sur le coeur. Visiblement émue par l'accueil toulousain, elle semble revenue d'un monde dangereux, et, encore convalescente, nous remercie de l'avoir soutenue dans sa traversée de l'obscurité.
Derrière les trois musiciens, un écran projette la photo de trois personnes âgées, assises dans la semi-obscurité d'une maison de retraite. Manière de nous dire qu'on finit tous au même endroit, qui que l'on soit ? En tous cas, tout de noir vêtue, Shannon, accompagnée de deux garçons sobres et discrets à la basse et à la batterie, nous aura balancé en plein poire un set d'une tension quasiment insoutenable. Les concerts de Shannon Wright ont la réputation d'être particulièrement intenses. J'ai réalisé une chose ce soir là : le mot est faible.
Venue défendre son petit dernier Secret Blood, retour à un son plus agressif et torturé, Shannon ne lui fait pas forcément la part belle, et en profite pour faire remonter de son répertoire les morceaux les plus violents. Ainsi, les albums Dyed In The Wool et surtout l'inoubliable et difficile Over The Sun seront largement représentés. Shannon, possédée, manie sa guitare comme un hachoir, la batterie et la basse cognent dans l'estomac. Au milieu de cette aridité instrumentale, il y a cette voix, timide au début puis se frayant progressivement une place, s'imposant au fur et à mesure que la miss plonge dans sa musique comme dans une eau noire, oubliant peu à peu le regard du public.
Shannon est peu loquace sur scène, à peine un faible " merci " de temps en temps. Nous verrons très peu son visage. Comme rempart entre son âme, mélange de force et de pudeur, et nous, ses cheveux tombant devant son visage, lui donnant l'aspect d'un cousin Machin version grunge. Parfois (rarement), le nez dépasse, et puis surtout cette bouche immense, grande voûte où se libère la souffrance. Un concert de Shannon Wright est un exutoire. Il y a quelque chose de profondément dérangeant, ressenti parfois sur les disques, d'être de trop, d'avoir ouvert une porte et de rester comme hypnotisé face à un grand déballage de reliques douloureuses, qui finalement ne nous concernent pas et que l'on aurait jamais dû voir. Je me suis donc senti au départ de trop, malgré moi dans la position d'un voyeur, pris au piège. "Et les voyeurs qui payent pour voir un exhibitionniste, c'est petit", comme disait ce grand Desproges. Mais le besoin de tout lâcher est trop fort. Les dernières résistances finissent par tomber, devant cette identité si forte, devant cet affrontement sans complaisance de la part obscure qui nous habite tous. La miss, hagarde, se balance, chante à fleur de peau ou vomit son amertume, cambrée sur le micro, dans une attitude de défiance suicidaire. Le public, souvent immobile de stupeur, comme pris au piège d'un poison paralysant, se dégourdit parfois pour manifester se reconnaissance aux premiers accords entortillés et venimeux de "With Closed Eyes" ou se tait religieusement aux derniers souffles de "You'll Be The Death".
Seulement deux titres seront joués au clavier (son fameux Wurlitzer), dans un calme tout relatif, Shannon n'hésitant pas nous expédier un "Hinterland" secoué de rapides convulsions rageuses.
Comme je ne voulais pas perdre une miette du concert, et que mon vieil argentique gênait toute la foule autour de moi, très compacte, je n'ai pris qu'une seule photo, que je trouve très représentative de ce moment trouble et profondément marquant.
Le concert se termine par une longue ovation. C'est à ce moment là qu'un beau moment, beau dans l'éphémère, survient. Shannon nous regarde enfin, et nous adresse un grand sourire humble, la main sur le coeur. Visiblement émue par l'accueil toulousain, elle semble revenue d'un monde dangereux, et, encore convalescente, nous remercie de l'avoir soutenue dans sa traversée de l'obscurité.
Exceptionnel ! ! 19/20 | par Sam lowry |
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