Iggy Pop
Post Pop Depression |
Label :
Loma Vista |
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Il est impossible d'écrire une ligne sur Post Pop Depression sans évoquer l'autre glorieuse collaboration de l'iguane.
Presque trop facilement, tout le monde a tendance à remettre une énième fois sur le tapis les deux bijoux de 77, Lust For Life et The Idiot. Pourquoi donc au fond ? Déjà parce depuis le décès surprise de David Bowie, son ombre semble planer partout. La faute peut-être aussi à "German Days" qui évoque cette période bénie où les deux amis vivaient l'une des collaborations les plus intéressantes de leur carrière. On peut aussi blâmer le chant de crooner d'Iggy Pop qui évoque de temps en temps Scott Walker, dont l'influence sur le chant de Bowie est indéniable.
Il n'y a naturellement pas que cela. La collaboration entre Iggy et Josh Homme semble du même tonneau que celle entre Pop et Bowie. Il y a dans l'imaginaire de beaucoup de personnes comme l'évidence qu'Iggy est infoutu de sortir une bonne galette tout seul. Pour espérer sortir quelque chose de potable, il faut que Pop s'entoure d'un génie. Cet étrange révisionnisme musical semble occulter l'enchaînement Brick By Brick et American Caesar du début des années 90, deux albums très bons. On va même plus loin en passant copieusement sous silence le troisième album issu de la collaboration entre Pop et Bowie. Visiblement, le mythe d'un Pop désœuvré aidé par un artiste providentiel doit persister. Post Pop Depression doit se poser comme un nouvel exemple.
C'est en fait ce qui est le plus déprimant avec cet album. C'est cette impression de faire face à un album de Josh Homme interprété par Iggy Pop tant l'Iguane lui a tout laissé entre les mains. On sent derrière cet album l'envie de l'icône punk de nous laisser un dernier album indubitablement bon avant de plier bagage, motivant la prise de contact avec un compositeur talentueux. Les textes parfois très lugubres ("An ocean of bodies/And then there's me/And I hope I'm not/Losing my life tonight" sur "In The Lobby") accentuent cette impression de fin annoncée. Bowie nous a entourloupés comme ça en début d'année, du coup on se méfie de tout maintenant. Quand je vous disais que son ombre planait partout.
Pourtant, ce qui est sincèrement marrant avec cet album, c'est qu'il ne sonne pas comme un album de Josh Homme. Vous attendiez un album remplis de murs de guitares ? C'est râpé. Post Pop Depression est ce qu'on peut appeler un album de rock mou qui se permet de temps en temps de petites fulgurances nerveuses. Les compositions laissent en fait la place à Iggy Pop pour poser sa voix de crooner, qui a gagné une profondeur indéniable avec le temps. D'un coup d'un seul, cet album se pose comme un objet clivant, entre les déçus qui s'emmerdent ferme quand Pop étire les syllabes sur "German Days" et ceux qui se surprennent à avoir de petits frissons en écoutant "American Valhalla", entre ceux qui trouvent l'ensemble lisse et mou et ceux qui le trouvent savoureux et riche. Il faut sans doute plusieurs écoutes avant d'arriver à se faire à ces compositions qui prennent bien leur temps avant d'exploser.
L'album met surtout en avant le talent de Josh Homme pour les arrangements qui sont bien souvent d'une finesse surprenante. De même, les ambiances qu'il arrive à tisser, en utilisant la voix de Pop comme un instrument, se révèlent très variées, notamment grâce à sa guitare qui distille des sons tantôt doux tantôt rêches de son sac à riffs. Les structures des chansons sont souvent bien difficiles à anticiper, tant les ruptures surprises sont monnaie courante. C'est sans doute ce procédé intelligent qui permet à l'auditeur de ne pas sombrer dans l'ennui à l'écoute de Post Pop Depression.
Impossible de résister à la chanson de fin, "Paraguay" où Iggy Pop se défait de son personnage de crooner pour se lancer dans un spoken-word épique soutenu par les chœurs de Homme, une batterie martiale et une guitare qui débite au tout venant une suite de riffs. C'est peut-être la piste que les détracteurs de l'album mettront en évidence. Beaucoup auraient aimé avoir un album contenant leur lot de pistes de la même trempe. C'est sans doute un gros défaut de cet album : que le temps fort soit celui qui se détache le plus du reste. Cependant je reste convaincu qu'il ne faut pas s'arrêter à ce constat : Post Pop Depression est un objet qui se savoure une fois la bête appréhendée, une fois acquis qu'on se trouve face à du rock mou, une fois qu'on a décelé les fulgurances qui vont toujours jalonner les pistes de l'album. Iggy a sous-entendu que cet album serait peut-être le dernier. Peut-être qu'il serait sage, en effet, de se quitter sur un effort d'une qualité qu'on n'avait pas vue depuis American Caesar il y a ... vingt-trois ans.
Presque trop facilement, tout le monde a tendance à remettre une énième fois sur le tapis les deux bijoux de 77, Lust For Life et The Idiot. Pourquoi donc au fond ? Déjà parce depuis le décès surprise de David Bowie, son ombre semble planer partout. La faute peut-être aussi à "German Days" qui évoque cette période bénie où les deux amis vivaient l'une des collaborations les plus intéressantes de leur carrière. On peut aussi blâmer le chant de crooner d'Iggy Pop qui évoque de temps en temps Scott Walker, dont l'influence sur le chant de Bowie est indéniable.
Il n'y a naturellement pas que cela. La collaboration entre Iggy et Josh Homme semble du même tonneau que celle entre Pop et Bowie. Il y a dans l'imaginaire de beaucoup de personnes comme l'évidence qu'Iggy est infoutu de sortir une bonne galette tout seul. Pour espérer sortir quelque chose de potable, il faut que Pop s'entoure d'un génie. Cet étrange révisionnisme musical semble occulter l'enchaînement Brick By Brick et American Caesar du début des années 90, deux albums très bons. On va même plus loin en passant copieusement sous silence le troisième album issu de la collaboration entre Pop et Bowie. Visiblement, le mythe d'un Pop désœuvré aidé par un artiste providentiel doit persister. Post Pop Depression doit se poser comme un nouvel exemple.
C'est en fait ce qui est le plus déprimant avec cet album. C'est cette impression de faire face à un album de Josh Homme interprété par Iggy Pop tant l'Iguane lui a tout laissé entre les mains. On sent derrière cet album l'envie de l'icône punk de nous laisser un dernier album indubitablement bon avant de plier bagage, motivant la prise de contact avec un compositeur talentueux. Les textes parfois très lugubres ("An ocean of bodies/And then there's me/And I hope I'm not/Losing my life tonight" sur "In The Lobby") accentuent cette impression de fin annoncée. Bowie nous a entourloupés comme ça en début d'année, du coup on se méfie de tout maintenant. Quand je vous disais que son ombre planait partout.
Pourtant, ce qui est sincèrement marrant avec cet album, c'est qu'il ne sonne pas comme un album de Josh Homme. Vous attendiez un album remplis de murs de guitares ? C'est râpé. Post Pop Depression est ce qu'on peut appeler un album de rock mou qui se permet de temps en temps de petites fulgurances nerveuses. Les compositions laissent en fait la place à Iggy Pop pour poser sa voix de crooner, qui a gagné une profondeur indéniable avec le temps. D'un coup d'un seul, cet album se pose comme un objet clivant, entre les déçus qui s'emmerdent ferme quand Pop étire les syllabes sur "German Days" et ceux qui se surprennent à avoir de petits frissons en écoutant "American Valhalla", entre ceux qui trouvent l'ensemble lisse et mou et ceux qui le trouvent savoureux et riche. Il faut sans doute plusieurs écoutes avant d'arriver à se faire à ces compositions qui prennent bien leur temps avant d'exploser.
L'album met surtout en avant le talent de Josh Homme pour les arrangements qui sont bien souvent d'une finesse surprenante. De même, les ambiances qu'il arrive à tisser, en utilisant la voix de Pop comme un instrument, se révèlent très variées, notamment grâce à sa guitare qui distille des sons tantôt doux tantôt rêches de son sac à riffs. Les structures des chansons sont souvent bien difficiles à anticiper, tant les ruptures surprises sont monnaie courante. C'est sans doute ce procédé intelligent qui permet à l'auditeur de ne pas sombrer dans l'ennui à l'écoute de Post Pop Depression.
Impossible de résister à la chanson de fin, "Paraguay" où Iggy Pop se défait de son personnage de crooner pour se lancer dans un spoken-word épique soutenu par les chœurs de Homme, une batterie martiale et une guitare qui débite au tout venant une suite de riffs. C'est peut-être la piste que les détracteurs de l'album mettront en évidence. Beaucoup auraient aimé avoir un album contenant leur lot de pistes de la même trempe. C'est sans doute un gros défaut de cet album : que le temps fort soit celui qui se détache le plus du reste. Cependant je reste convaincu qu'il ne faut pas s'arrêter à ce constat : Post Pop Depression est un objet qui se savoure une fois la bête appréhendée, une fois acquis qu'on se trouve face à du rock mou, une fois qu'on a décelé les fulgurances qui vont toujours jalonner les pistes de l'album. Iggy a sous-entendu que cet album serait peut-être le dernier. Peut-être qu'il serait sage, en effet, de se quitter sur un effort d'une qualité qu'on n'avait pas vue depuis American Caesar il y a ... vingt-trois ans.
Parfait 17/20 | par WillyB |
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