Screaming Trees

Sweet Oblivion

Sweet Oblivion

 Label :     Epic 
 Sortie :    mars 1992 
 Format :  Album / CD  Vinyle  K7 Audio   

Les Screaming Trees font partie de la légende grunge. Mais pas celle des concerts immenses, des college radio américaines et des couvertures de fanzines. Plutôt l'autre facette de Seattle, celle des ignorés, des puristes, des petites salles, des jams sessions entre potes et du grunge substansifié jusqu'à sa propre essence. De toutes façons, le groupe n'a jamais pu émerger sur MTV: la chaine ayant tout simplement refusé de diffuser des clips où figuraient des types obèses ! Et puis qui voudrait d'un groupe instable aux frasques incessantes ? Bagarres entre les frères Cooner (même en studio), vrais-faux départs du leader, préférant enregistrer ses albums solos ou se prendre des cuites avec son ami Kurt Cobain, absences répétées du guitariste Cooner pour aller prêter main forte à Jay Mascis lors de la realisation de Green Mind, prises assumées de drogue ou encore remplacement au pied levé du batteur Mark Pickerel, parti former Truly; la formation cumule les déboires.
Mais peu importe car les Screaming Trees gagneront le statut d'incontournable dans le milieu par la simple force de leur talent. Le groupe de Mark Lanegan présente un contraste fascinant entre les fredaines et ce permanent déséquilibre au bord de la rupture et cette incroyable unité qui se dégage de leur musique.
Porté par "Nearly Lost You", écrite pour la BO du film Singles, Sweet Oblivion est une totale réussite, canalisant enfin les inspirations des frères Cooner et la lourdeur des guitares typiques de l'époque. Dès "Shadow Of The Seasons" et son intro aux percussions, on sent que tout l'album va être un enchainement de purs riffs et d'électricité ravageur. Et c'est effectivement le cas: toutes les chansons sont carrément jouissives ! Les frères Cooner à la guitare et à la basse sont au sommet de leur virtuosité. Mark Lanegan chante comme jamais, de sa voix hyper grave de crooner torturé et déséspèrement alcoolique. C'est une pure merveille rien que de l'entendre.
Produit par Don Fleming (Sonic Youth, Dinosaur Jr) et mixé par Andy Wallace (qu'on ne présente plus), ce sixième album parachève le non moins excellent Uncle Anesthesia. Il arrive à exprimer l'alchimie indéniable des compositions dans sa plus éclatante évidence. On ne peut s'empêcher de savourer avec délectation (et en secouant machinalement la tête comme au bon vieux temps) des joyaux comme "Butterfly", limite psyché, ou "Winter Song", joué à fond les manettes. Même une guitare sèche pointe le bout de son nez sur "Dollar Bill", bouleversante d'intensité émotionelle.
Les solos sont tout bonnement ébouriffants, l'énergie des Screaming Trees a de quoi laisser pantois, tout en restant fidèle à un schéma classique guitare-basse-batterie. Mais cela n'empêche pas une certaine obscurité, un côté sombre qu'on retrouve parfois sur des titres, tel "Trouble Times". Tout cela forme un tout à la fois immédiatement irressitible mais aussi désespéré, indéfini et tourbillonant.
A l'écoute de ce disque magistral et dévastateur, on voudrait revenir quinze ans en arrière pour vivre et revivre encore ces années bénites où la musique atteignait des sommets inateignables de simplicité et d'invention. Aujourd'hui Mark Lanegan continue de tailler sa route, en solos ou avec les Queens Of The Stone Age, de façon aussi admirable que discrète. Cela ne nous empêche pas de ressentir un petit pincement au coeur en se recueillant devant un bon vieux disque de ce groupe culte.


Excellent !   18/20
par Vic


Proposez votre chronique !







Recherche avancée
En ligne
245 invités et 0 membre
Au hasard Balthazar
Sondages
Pour toi, la réponse à la grande question sur la Vie, l'Univers et le Reste est :