Jacques Higelin

Amor Doloroso

Amor Doloroso

 Label :     Odeon 
 Sortie :    lundi 20 novembre 2006 
 Format :  Album / CD  Vinyle   

Après plus de 40 ans de bons et loyaux services et 8 ans en retrait de la scène publique, le papa Higelin revient se faire une cure de jouvence sur le devant de la scène de la chanson-rock française avec son nouvel album Amor Doloroso. Et malgré les légitimes angoisses qui peuvent prendre l'auditeur, soucieux de l'image qu'il s'est construit du géant, avant d'appuyer sur le bouton "play", Jacques Higelin ne s'est pas transformé en papy rockstar incontinent, pissant ses vieux tubes dans nos tympans jusqu'à l'épuisement. Non, pas cette fois. Par rapport à son dernier album de 1998, Paradis Païen, il semble même rajeuni. Il n'y a qu'à l'écouter conter inlassablement les amours douloureux et passionnels de mille manières différentes, avec sa prose rythmée, délirante mais juste... en un mot imprévisible.

Pour ses retrouvailles avec son public, Higelin s'entoure entre autre de Rodolphe Burger à la production, le génial globe-trotter père de Kat Onoma, et des percussions chaleureuses de Dominique Mahut. Retrouvailles également avec son propre style, jamais vraiment parti, de clodo-bluesman pervers qui croone à la lune. Higelin nous est revenu en bonne forme, plus mûr que jamais. L'homme ne bondit plus dans tous les sens, nulle trace à l'horizon d'un successeur de l'hystérique qui pondit un jour "L'attentat à la pudeur" ou d'un épique "Captain Bloody Samouraï" mais plutôt d'un vieux sage qui réserve ses grimaces en loucédé aux plus attentifs. "Queue de paon", candide ballade ou pied-de-nez taquin ? On est en droit de s'interroger devant un texte débutant par : "Pour toi mon amour/Je voudrais avoir/Une longue, longue, longue, longue et large/Queue... de paon". Mais qu'importe, les métaphores nuptiales jaillissent, incandescentes au milieu des arrangements de cordes orientaux, la voix rugueuse se fait séduisante ou troublante sur "Prise de bec", récit de la douce torture du désir. Mais parfois le mâle alpha s'éclipse et retire son armure pour afficher sa passion sur "J't'aime Telle" ou "Ice Dream" et sa coupe d'images fruitées et de bons mots. Perpétuant sa grande tradition de jeux de mots laids, Higelin nous en offre une pleine poignée sur "Crocodaïl", reflet rafraîchi de la période Champagne & Caviar au même titre que "Helloween", version mélancolique de la fameuse "Champagne". Mais le sublime, Higelin l'atteint sur la chanson éponyme désespérée au nom équivoque : "Amor Doloroso" . L'amour douloureux, qu'il raconte d'une voix prête à se briser à tout moment. Chez un autre, l'auto-apitoiement aurait vite lassé. Mais avec Higelin, le cœur qu'il met à l'ouvrage et sa simple voix font des merveilles. Comme le disait Nicolas Comment, c'est son énergie qui fait que "Tête en l'air" (sur Champagne...) n'est pas une chanson d'amour, mais un 'chant d'amour'. Ici, c'est l'intensité de l'homme, sa puissante détresse qui font de "Amor Doloroso" un chant de désespoir.

Jacques Higelin, un des derniers Grands de la musique française, rock ou non, est encore en vie. Et au vu de la qualité qu'il parvient encore à produire sur ses disques récents, il serait criminel de s'en priver.


Très bon   16/20
par X_Wazoo


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