Swans
Filth / Body To Body, Job To Job |
Label :
Young God |
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Il y a les groupes qui veulent se donner des allures de mauvais garçons et qui se disent qu'ils seraient bien inspirés d'ajouter quelques croûtons de rock noisy dans leur potage, et il y a ceux pour qui la crasse et l'abjection sont une nature à part entière, instinctive et sans calcul. Les premiers n'en oublient pas pour autant de rester propres sur eux, ils sortent le jean du dimanche pour les photos et sont tout émoustillés lorsqu'un misérable larsen s'échappe par erreur de leur ampli si bien réglé. Les seconds baignent dans leur jus depuis l'origine des temps, respirent et transpirent les bas-fonds des mégalopoles et se foutent du rendu mélodique, du succès, des feux de la rampe. Dans le genre, nous pouvons citer Unsane, mais surtout les Swans qui, dès leur premier album Filth, sorti en 1983, définissent un genre à part entière.
Mélange de punk ralenti à l'extrême, de rock vitriolé et d'expérimentations sonores visant à remodeler les structures traditionnelles d'une musique alors sclérosée, nous sommes ici aux antipodes du progressif lénifiant et de la world music qui cartonnent à l'époque. Underground jusqu'au bout des ongles noirs, les compositions se distinguent par le mal être qu'elles exsudent, l'angoisse profonde qui les anime. Gira scande ses textes exempts de lignes vocales identifiables, certaines rythmiques frôlant un ritualisme industriel ("Power For Power") parfaitement aliénant.
Même si l'amateur de noise rock pourra bien sûr trouver des parallèles entre cette production et les premiers Sonic Youth (Confusion Is Sex notamment), la démarche arty et l'intellectualisation des derniers sont absentes de ce Filth, parfois animé de soubresauts hardcore ("Freak") qui saccagent tout de par leur virulence et leur empressement quasi grind.
Autant le culte qui entoure certains groupes (Flipper, par exemple) est plus que discutable, autant il se révèle évident à l'écoute de ce premier glaviot sanglant... Musique en noir et blanc, glauque et urbaine, elle est un viol, une transgression et un inversement des valeurs total. La réédition de ce premier album s'accompagne d'un live de trente minutes au mythique "The Kitchen" de New York : On imagine alors aisément la véritable expérience que devait être de voir le groupe sur scène à l'époque. Rythmes déglingués, oppression constante, la moindre mélodie bannie, bref, largement de quoi choquer le public le plus averti. Richard Kern a filmé la Grosse Pomme dans ce qu'elle avait de pire, Swans lui a donné la parole. Ce qu'elle a dire fait froid dans le dos...
En complément de Filth, Gira déterre seize titres plus ou moins inédits et enregistrés entre 1981 et 1985 dans différents clubs pour en faire un album : Body To Body, Job To Job. L'unité stylistique est là, avec ces alternances entre des titres très expérimentaux, tant dans leur structure que dans les sons, et d'autres davantage orientés noise rock, post punk, mais toujours aussi barrés. Jarboe n'étant pas encore là pour féminiser quelque peu l'inspiration, on nage donc dans un univers de testostérone en décomposition, de marécages et de fanges nauséabondes où le dégoût règne en maître incontesté ("Mother, My Body Disgusts Me.")
Évidemment, tout cela est indispensable, véritable alpha d'un genre mineur en termes de renommée mais majeur quant à son apport à la musique moderne. En revanche, impossible de dire que les néophytes et les amateurs de rock léché y trouveront leur compte, à moins de vouloir commencer la visite par l'abattoir et la déchetterie...
Mélange de punk ralenti à l'extrême, de rock vitriolé et d'expérimentations sonores visant à remodeler les structures traditionnelles d'une musique alors sclérosée, nous sommes ici aux antipodes du progressif lénifiant et de la world music qui cartonnent à l'époque. Underground jusqu'au bout des ongles noirs, les compositions se distinguent par le mal être qu'elles exsudent, l'angoisse profonde qui les anime. Gira scande ses textes exempts de lignes vocales identifiables, certaines rythmiques frôlant un ritualisme industriel ("Power For Power") parfaitement aliénant.
Même si l'amateur de noise rock pourra bien sûr trouver des parallèles entre cette production et les premiers Sonic Youth (Confusion Is Sex notamment), la démarche arty et l'intellectualisation des derniers sont absentes de ce Filth, parfois animé de soubresauts hardcore ("Freak") qui saccagent tout de par leur virulence et leur empressement quasi grind.
Autant le culte qui entoure certains groupes (Flipper, par exemple) est plus que discutable, autant il se révèle évident à l'écoute de ce premier glaviot sanglant... Musique en noir et blanc, glauque et urbaine, elle est un viol, une transgression et un inversement des valeurs total. La réédition de ce premier album s'accompagne d'un live de trente minutes au mythique "The Kitchen" de New York : On imagine alors aisément la véritable expérience que devait être de voir le groupe sur scène à l'époque. Rythmes déglingués, oppression constante, la moindre mélodie bannie, bref, largement de quoi choquer le public le plus averti. Richard Kern a filmé la Grosse Pomme dans ce qu'elle avait de pire, Swans lui a donné la parole. Ce qu'elle a dire fait froid dans le dos...
En complément de Filth, Gira déterre seize titres plus ou moins inédits et enregistrés entre 1981 et 1985 dans différents clubs pour en faire un album : Body To Body, Job To Job. L'unité stylistique est là, avec ces alternances entre des titres très expérimentaux, tant dans leur structure que dans les sons, et d'autres davantage orientés noise rock, post punk, mais toujours aussi barrés. Jarboe n'étant pas encore là pour féminiser quelque peu l'inspiration, on nage donc dans un univers de testostérone en décomposition, de marécages et de fanges nauséabondes où le dégoût règne en maître incontesté ("Mother, My Body Disgusts Me.")
Évidemment, tout cela est indispensable, véritable alpha d'un genre mineur en termes de renommée mais majeur quant à son apport à la musique moderne. En revanche, impossible de dire que les néophytes et les amateurs de rock léché y trouveront leur compte, à moins de vouloir commencer la visite par l'abattoir et la déchetterie...
Très bon 16/20 | par Arno Vice |
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