The Shins
Heartworms |
Label :
Aural Apothecary / Columbia |
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Heartworms, c'est un album que j'aurais vraiment voulu adorer du début à la fin. Ce n'est malheureusement pas le cas. Je ne suis pas en train de dire qu'il est mauvais, bien au contraire, il est même plutôt bon à vrai dire. Mais les Shins, bien malgré eux, sont de ces groupes condamnés, de mon point de vue, à l'excellence, la faute à leurs trois premiers albums parfaits et à un quatrième plus intéressant qu'il n'y paraît. Tout avait pourtant bien commencé. Jugez plutôt. Le premier titre dévoilé au public, "Dead Alive", avait ce parfum, cette nonchalance délicieuse, ce je-ne-sais-quoi qui nous ramenait une dizaine d'années en arrière, au début des années 2000, et donc de la carrière du groupe (le clip de ladite chanson étant lui aussi de toute beauté, comme souvent avec les Shins). Ensuite, on découvrait l'ensemble des morceaux présents sur l'album et l'on remarquait la présence de "So Now What", déjà présent sur la BO de Wish I Was Here, le deuxième film de Zach Braff sorti en 2014. Comment, à son écoute, ne pas songer une fois encore au glorieux passé du groupe (rappelez-vous Garden State, sa BO), qui se trouve ici réactualisé ? Ce titre brillant bénéficie également de cet esprit des origines, avec toujours ce sentiment de légèreté, d'insouciance qui le traverse dans sa totalité, notamment grâce au refrain ("I had this crazy ideaaaa") que James Mercer nous chante de sa voix aérienne que l'âge n'altère pas. C'est le même Mercer que l'on retrouve seul à la production de ce disque (à l'exception de "So Now What", produite par Richard Swift), là aussi une première depuis Oh, Inverted World en 2001, production qui d'ailleurs revient à un son plus artisanal, rappelant par moments celle de Chutes Too Narrow, leur chef-d'œuvre de 2003, sans pour autant abandonner les avancées quelque peu synthétiques de Port Of Morrow, paru en 2012. Enfin, la magnifique pochette renoue avec l'inventivité et l'originalité graphique et visuelle de celle de (encore !) Chutes Too Narrow.
Ce sentiment diffus d'être en terrain connu se renforce à l'écoute d'autres titres du disque, placés, comme ceux évoqués précédemment, dans sa deuxième moitié, surtout l'éponyme "Heartworms", qui aurait très bien pu trouver sa place sur (décidément !) Chutes Too Narrow. Tout est réuni dans ce morceau, le son, le format court, les harmonies vocales un rien vaporeuses et toujours cette impression de facilité, de légèreté un peu irréelle qui en émane. Ce titre est un concentré de l'art des Shins à leur sommet. Peut-être le meilleur du disque. Autre moment fort, "The Fear", qui conclut l'affaire de manière assez somptueuse (habitude fréquente pour le groupe), est traversé par des parties de cordes soyeuses et par un délicat harmonica, très approprié à son ambiance générale. Enfin, avec "Half A Million", on retrouve un morceau dynamique, énergique, où les synthés virevoltants rappellent une fois encore les débuts du groupe, mais aussi Port Of Morrow, pour un mix entre les périodes vraiment emballant. Une nouvelle réussite donc. Mais alors, qu'est-ce qui ne va pas avec ce disque me diriez-vous ? Je vais vous le dire les gens.
Ce qui ne va pas trop à mon sens, c'est son début. Encore une fois, ces premiers titres n'ont rien de honteux ni de foncièrement déshonorant. Mais il y a comme un manque de consistance qui se fait ressentir, une absence qui me fait dire que ça ressemble bien à du Shins, ça en a l'apparence, un peu le goût, mais que, au final, on ne s'y retrouve pas totalement. Pourtant "Name For You", l'ouverture de l'album (aux belles paroles féministes, écrite par Mercer pour ses filles), sa sautillante ligne de basse, ses chœurs a tout pour plaire, mais, rien à faire, je ne suis pas pleinement convaincu. Pareil avec "Mildenhall" et ses accents country, ses percussions minimales, ses claviers colorés, il y a l'idée, l'intention est bien présente, mais elle n'est pas totalement concrétisée. Même sentiment face à "Rubber Ballz", au rythme plus élevé, mais qui n'emporte là aussi pas véritablement la mise. Ces deux derniers titres annoncent néanmoins la suite évoquée plus haut et relèvent le niveau. Car là où le bât blesse plus douloureusement pour moi, c'est avec ce qui nous est proposé avant. Que ce soit "Painting A Hole", "Cherry Hearts" et "Fantasy Island", j'ai l'impression que ça tourne à vide, que c'est un brin laborieux, que ça n'avance pas trop et que ça s'étire un peu inutilement. Bref, pour la première fois, je ne ressens pas le frisson que je connais habituellement lorsque j'écoute The Shins, et c'est peut-être la pire critique que je puisse adresser à un groupe et à sa musique, car cela nous ramène à l'élément fondamental qui nous pousse à écrire sur ce sujet précis, la musique et l'émotion qu'elle nous procure. Et là, à mon grand regret, je reste de marbre face à ces morceaux. Où est passée l'intensité de "Phantom Limb" ? La folie douce de "Fighting In A Sack" ? La beauté épurée de "The Past And Pending" ? Envolées à jamais ? Je ne suis pourtant pas du genre à regarder en arrière et j'essaye toujours de comprendre les évolutions d'un groupe, quitte à me fourvoyer un peu parfois, à tenter d'enjoliver une réalité peu flatteuse et à me torturer l'esprit inutilement, mais, dans le cas présent, je suis obligé de confesser mon amère déception quant aux trois titres pré-cités et à l'équilibre précaire de quelques autres.
Toutes ces réserves, qui peuvent paraître sévères (mais justifiées !), signifient-elles que Heartworms est un mauvais disque ? Non évidemment, comme je me suis appliqué à le montrer dans les premiers paragraphes de cette chronique, c'est même un bon disque au final. Certains de ses morceaux respirent les débuts de l'histoire du groupe, les réactualisent même de belle manière, marient les époques pour aboutir à des titres vraiment bien ficelés, à l'écoute desquels on ne boude pas son plaisir, dans la droite lignée de ce à quoi James Mercer et son groupe (ici quasi entièrement renouvelé une fois encore) nous avaient habitués jusque-là. Mais au vu de leur passé et de ce qu'ils m'ont apporté avec leurs œuvres précédentes, j'affirme que les Shins ne peuvent pas se permettre de composer des morceaux comme ceux que j'ai brocardés, ils se doivent de côtoyer l'excellence en permanence ! Vœu pieu de fan, comme chacun d'entre nous doit en prononcer régulièrement. Je ne sais pas trop comment Mercer pourrait s'y prendre pour faire revivre plus intensément la passion que son art a su provoquer en moi (peut-être en cassant ce rythme qui l'amène à sortir un album des Shins tout les cinq ans après un de Broken Bells depuis 2007, retrouver une stabilité au niveau de ses partenaires...). Ce dont je suis sûr, c'est qu'il en est sans conteste capable (la deuxième partie de ce Heartworms en témoigne), reste plus qu'à savoir sous quelle forme et quand. Courage James et fais-moi rêver !
Ce sentiment diffus d'être en terrain connu se renforce à l'écoute d'autres titres du disque, placés, comme ceux évoqués précédemment, dans sa deuxième moitié, surtout l'éponyme "Heartworms", qui aurait très bien pu trouver sa place sur (décidément !) Chutes Too Narrow. Tout est réuni dans ce morceau, le son, le format court, les harmonies vocales un rien vaporeuses et toujours cette impression de facilité, de légèreté un peu irréelle qui en émane. Ce titre est un concentré de l'art des Shins à leur sommet. Peut-être le meilleur du disque. Autre moment fort, "The Fear", qui conclut l'affaire de manière assez somptueuse (habitude fréquente pour le groupe), est traversé par des parties de cordes soyeuses et par un délicat harmonica, très approprié à son ambiance générale. Enfin, avec "Half A Million", on retrouve un morceau dynamique, énergique, où les synthés virevoltants rappellent une fois encore les débuts du groupe, mais aussi Port Of Morrow, pour un mix entre les périodes vraiment emballant. Une nouvelle réussite donc. Mais alors, qu'est-ce qui ne va pas avec ce disque me diriez-vous ? Je vais vous le dire les gens.
Ce qui ne va pas trop à mon sens, c'est son début. Encore une fois, ces premiers titres n'ont rien de honteux ni de foncièrement déshonorant. Mais il y a comme un manque de consistance qui se fait ressentir, une absence qui me fait dire que ça ressemble bien à du Shins, ça en a l'apparence, un peu le goût, mais que, au final, on ne s'y retrouve pas totalement. Pourtant "Name For You", l'ouverture de l'album (aux belles paroles féministes, écrite par Mercer pour ses filles), sa sautillante ligne de basse, ses chœurs a tout pour plaire, mais, rien à faire, je ne suis pas pleinement convaincu. Pareil avec "Mildenhall" et ses accents country, ses percussions minimales, ses claviers colorés, il y a l'idée, l'intention est bien présente, mais elle n'est pas totalement concrétisée. Même sentiment face à "Rubber Ballz", au rythme plus élevé, mais qui n'emporte là aussi pas véritablement la mise. Ces deux derniers titres annoncent néanmoins la suite évoquée plus haut et relèvent le niveau. Car là où le bât blesse plus douloureusement pour moi, c'est avec ce qui nous est proposé avant. Que ce soit "Painting A Hole", "Cherry Hearts" et "Fantasy Island", j'ai l'impression que ça tourne à vide, que c'est un brin laborieux, que ça n'avance pas trop et que ça s'étire un peu inutilement. Bref, pour la première fois, je ne ressens pas le frisson que je connais habituellement lorsque j'écoute The Shins, et c'est peut-être la pire critique que je puisse adresser à un groupe et à sa musique, car cela nous ramène à l'élément fondamental qui nous pousse à écrire sur ce sujet précis, la musique et l'émotion qu'elle nous procure. Et là, à mon grand regret, je reste de marbre face à ces morceaux. Où est passée l'intensité de "Phantom Limb" ? La folie douce de "Fighting In A Sack" ? La beauté épurée de "The Past And Pending" ? Envolées à jamais ? Je ne suis pourtant pas du genre à regarder en arrière et j'essaye toujours de comprendre les évolutions d'un groupe, quitte à me fourvoyer un peu parfois, à tenter d'enjoliver une réalité peu flatteuse et à me torturer l'esprit inutilement, mais, dans le cas présent, je suis obligé de confesser mon amère déception quant aux trois titres pré-cités et à l'équilibre précaire de quelques autres.
Toutes ces réserves, qui peuvent paraître sévères (mais justifiées !), signifient-elles que Heartworms est un mauvais disque ? Non évidemment, comme je me suis appliqué à le montrer dans les premiers paragraphes de cette chronique, c'est même un bon disque au final. Certains de ses morceaux respirent les débuts de l'histoire du groupe, les réactualisent même de belle manière, marient les époques pour aboutir à des titres vraiment bien ficelés, à l'écoute desquels on ne boude pas son plaisir, dans la droite lignée de ce à quoi James Mercer et son groupe (ici quasi entièrement renouvelé une fois encore) nous avaient habitués jusque-là. Mais au vu de leur passé et de ce qu'ils m'ont apporté avec leurs œuvres précédentes, j'affirme que les Shins ne peuvent pas se permettre de composer des morceaux comme ceux que j'ai brocardés, ils se doivent de côtoyer l'excellence en permanence ! Vœu pieu de fan, comme chacun d'entre nous doit en prononcer régulièrement. Je ne sais pas trop comment Mercer pourrait s'y prendre pour faire revivre plus intensément la passion que son art a su provoquer en moi (peut-être en cassant ce rythme qui l'amène à sortir un album des Shins tout les cinq ans après un de Broken Bells depuis 2007, retrouver une stabilité au niveau de ses partenaires...). Ce dont je suis sûr, c'est qu'il en est sans conteste capable (la deuxième partie de ce Heartworms en témoigne), reste plus qu'à savoir sous quelle forme et quand. Courage James et fais-moi rêver !
Bon 15/20 | par Poukram |
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