Art Brut

Paris [La Cigale] - lundi 26 juin 2006

Vous en avez parfois marre des groupes de rock anglais qui se succèdent comme des clones et qui connaissent un succès parfois peu compréhensible ? Vous en avez assez de la vacuité de leur musique, de l'insignifiance de leurs textes ? Pour ne citer qu'un exemple récent, vous renverriez bien les Arctic Monkeys sur leur banquise ? Si vous êtes dans ce cas, un conseil : faites comme moi, allez voir Art Brut en concert. Ce n'est pas que leur punk-rock, certes bien balancé, soit novateur, ça non. Mais leurs textes sarcastiques, remplis d'autodérision, sont pour le moins salutaires par les temps qui courent. C'est cet esprit-là, ironique et corrosif, qui a tendance à se faire trop rare dans le rock actuel et qu'il est si réconfortant de retrouver sous la plume d'Eddie Argos. Voilà donc pourquoi j'étais heureux de me rendre à La Cigale ce soir-là.
Le groupe se pointe sur scène : trois gars et une fille, bientôt rejoints par monsieur Eddie qui est élégamment vêtu d'un costard beige. Et ça commence très fort avec "Formed A Band". Tout en chantant avec son style particulier, assez déclamatoire, Eddie Argos nous présente ses comparses en les pointant successivement du doigt. Dans cette entrée en matière sympatoche, je sens comme une arrogance désamorcée, le paradoxe génial d'une modestie forte en gueule. Et surtout, un rafraîchissant rappel de la ‘philosophie' punk : on est juste une petite bande de cinq p'tits jeunes, on est pas des virtuoses mais ça nous empêchent pas de nous faire plaisir, de vous faire plaisir, alors faites comme nous, montez un groupe, c'est pas compliqué, quoi !
Le morceau suivant est le tout aussi irrésistible "My Little Brother". Le public est déjà chaud-bouillant. Une chaleur qui semble gagner le chanteur, qui se débarrasse de sa veste, puis de ses chaussures. Il se retrouve ainsi en chaussettes, de très jolies chaussettes d'ailleurs, avec tout plein de mignons cercles multicolores. Avec son ventre proéminent de buveur de bière, cela pourrait lui donner une allure plutôt pataude. Mais pas du tout. Il est bien trop barré pour ça et son chant dégage trop d'énergie. Avec beaucoup d'humour, il harangue le public entre chaque morceau, se lançant dans des tirades délirantes, nous racontant par exemple en détail son amour nostalgique pour la petite "Emily Kane", avec une main tenue à plat près du sol pour nous signifier qu'il était tout jeune quand il a connu cette personne, jamais revue depuis ( snif...on est avec toi, Eddie...). Le groupe joue fort et bien. Ce n'est certes pas de la dentelle fine, mais c'est efficace et entraînant. Le batteur joue constamment debout, le guitariste maîtrise bien ses riffs, et une très bonne bassiste tient parfaitement le tout. Quant au chanteur, il se lâche de plus en plus en allant pogoter dans le public, justement là où une petite bande de fous furieux s'excitait depuis un moment avec moult slams et coups d'épaules. La fin du set est excellente avec en particulier la formidable "Bad Week-End", suivie de près par "Good Week-End", une chanson dont Eddie Argos déclare qu'elle est prédestinée à atteindre la première place des charts en Angleterre, en France, et même partout ailleurs !...
Si vous voulez voir et entendre du rock brut de décoffrage, avec un chanteur qui a du coffre ainsi qu'une verve incomparable, ne ratez pas ce groupe.


Très bon   16/20
par Oddie


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