Logh

A Sunset Panorama

A Sunset Panorama

 Label :     Bad Taste 
 Sortie :    lundi 21 février 2005 
 Format :  Double Album / CD   

Logh mériterait tous les honneurs pour oser être audacieux et un splendide artisan d'une musique d'orfèvre. Seulement qui a entendu parler de ce groupe suédois ? Se dépêtrant alors avec le peu de moyen proposé par leur label, Logh va pourtant, envers et contre tout, continuer sa route, perdurer dans son statut d'éclaireurs raffinés. Depuis leur premier album (Everytime A Bell Rings An Angel Gets His Wings), déjà chef-d'oeuvre parfait et insurpassable (par aucun groupe, ni même par eux), la formation n'a jamais cessé de se remettre en question, de pousser les limites du format pop-song, d'explorer de nouvelles pistes. Ils auraient pu devenir des étoiles filantes, ils ont préféré prendre des risques et rester des alchimistes chevronnés et consciencieux. Car Logh détient la capacité inestimable de tout transformer en or. Tout en restant discret, modeste et lucide, il a avant tout plus désiré la justesse que l'exubérance, la fidélité que la corruption ou la spontanéité que la surenchère. Logh a toujours fasciné par sa capacité à jouer une musique réfléchie, séminale mais aussi farouchement charnelle.
The Raging Sun était ainsi une démonstration spontanée d'une fougue, d'une envie de fuite en avant. Toujours en mouvement, avec le refus constant de se cantonner aux acquis, Logh publiera A Sunset Panorama comme s'il s'agissait d'une énième manifestation de plus, un cri brutal et un fracas balancé sans espoir de conquête. Juste un symptôme passionnel.
Préférant passer son temps en tournée, le groupe ne s'enfermera en studio que pendant une journée, juste ce qu'il faut pour enregistrer de manière live, en une seule prise. Cette démarche n'est pas innocente, elle permet de se déclarer instinctivement. Qui tenterait aujourd'hui de se produire ainsi sans filet ? Le groupe se livre à l'expérimentation, selon eux, c'est le meilleur vecteur à l'intensité de leur musique. Une prestation qui se passe de toutes les barrières et autres couvertures de studio, qui peuvent creuser un fossé entre les musiciens et l'auditeur. On trouvera d'ailleurs joint un DVD bonus, permettant d'assister à ces enregistrements studio réalisés en à peine un tour d'horloge.
La musique de Logh, en plus d'être toujours aussi raffinée et délicieusement énergique, se fait encore plus directe et chaleureuse. Les émotions suscitées n'en sont que plus palpables, vibrantes et authentiques. A Sunset Panorama est le terrain chaotique où se rencontrent une écriture pop élégiaque et névrosé et un rock résolument tendu, physique. L'apparente tristesse se transforme en beauté attendrissante lors d'un puzzle captivant.
"String Theory" introduit l'album à coup de notes doucement grattées et de slides qui se dissolvent avant que l'irrésistible "Fell Into Well" ne balance son refrain magnifique de manière aussi nonchalante que classieuse. Les lignes suivies sont toujours interrompues ou détournées pour d'autres schémas mélodiques, rendant les chansons plus complexes qu'elles n'y paraissent en format court, sinueuses et envoûtantes ("Trace Back the Particle Track" ou "Destinymanifesto"). Mattias Friberg chante de façon immédiate, sans calcul, se laissant aller à son humeur, ce qui rend les chansons criantes de vérité. Le groupe joue sans retenue, le nouveau et jeune batteur Marco Hildèn impose un rythme présent et martial sur lequel décrochent les notes détachées et espacées de Jens Hellgren, qui finissent par se répandre comme un caillou dans l'eau disperse ses ondes. Le ton est frais, direct et majestueux. Cet aspect live confère à l'ensemble un cachet indéniable, cristallin et pur comme la neige.
Mais la mélancolie tenace et chère à ce groupe avant tout sensible, ressurgit bien vite, que ce soit dans ces accords sensibles, ces passages plus lents (le final exquis de "Sunset Knife Fight") ou ces slides qui disparaissent au loin. La musique de Logh a toujours su propager des émotions amères qui touchent au plus profond. "Asymetric Trick" ou "Ahabian" bouleversent les cœurs de part leur finesse traînante et contemplative. Les touches de piano saisissent à la gorge, pourtant elles sont peu nombreuses et éparses. Mais c'est cette atmosphère entre blanc et noir qui nous perturbe, nous touche et finalement nous conquêt. La poésie existe aussi dans ces ambivalences, là où nos sentiments sont plus prés d'y trouver une résonance. "Bring On The Either", avec son martelage de guitares sourdes, serait presque d'une obscurité effrayante. Logh se fait l'écho de tout ce qu'il lui traverse l'esprit. En un instant, donc en bloc, sans tri, sans retenue.
Un charme prodigieux opère: entre rock bancal et lyrisme éploré, un équilibre se créé. Ce son fragile et frontal se met au service de grandes chansons épiques de la trempe de "My Teacher's Bed" ou du crescendo lumineux "The Smoke Will Head You Home", pour les porter aux nues. Le groupe voyage dans les sommets royaux.
Nouveau chef-d'œuvre, prompt et franc, A Sunset Panorama se balade parmi les tourments et l'inspiration, plongeant dans le désenchantement le plus touchant comme s'envolant dans la grâce la plus sensible. Ce disque n'est pas évident, il prend surtout aux tripes, serre le cœur, fait monter quelques envies noires. Mais c'est un album très personnel, que l'on ne fera pas écouter si facilement aux autres, et auquel on s'attache comme si c'était le notre...


Intemporel ! ! !   20/20
par Vic


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