(Hed) Pe

(Hed) Pe

(Hed) Pe

 Label :     Jive 
 Sortie :    lundi 30 juin 1997 
 Format :  Album / CD  K7 Audio   

Ce premier album est un paradoxe ambulant, à l'image même du groupe. Après à peine trois ans de surexploitation, la vague nü, neo, rapcore ou cequevousvoulezaujourd'huic'estportesouvertes metal est déjà à saturation.

C'est que MTV a failli louper le coche voyez-vous. Deftones et Korn, les deux locomotives de la cashmachine rock du moment ont d'abord été boudés par le médium. Voyant la rentabilité plus qu'évidente du "mouvement" à travers la culture skate et les festivals associés, ils ont donc comblé leur retard d'une petite année, mettant sur le devant de la scène tout quidam arborant au choix piercings, tatouages, tresses, dreadlocks, baggy, chaussures de skate, et connaissant sur le bout des ongles ses classiques, de Metallica à Public Enemy. Et alors même que les afficionados se détournent déjà de ce qui devient un modèle économique musical, cet obscur petit combo californien sort sa galette sur le label de Britney Spears. Et a tous les défauts d'un mouvement qui s'autoparodait déjà trois ans après sa naissance.

Commençons tout de suite par les points qui fâchent, et y en a pas qu'un peu. (Hed) Pe s'autoproclame créateur du sous-sous-sous-sous genre Hop Core, ou Gangsta Punk, voir G Punk si vous êtes vraiment cool. Je sais pas vous mais moi, rien que ça déjà, ça me fait tourner les talons. En effet le chanteur revendique fièrement son appartenance à la West Coast et sert donc tous les gimmicks éculés du genre. Ce qui est rapidement insupportable pour les amateurs de rap sobre et cadré (dont je suis). Côté musique, on retrouve ce qui est devenu la bible en matière de composition: une intro toute en ambiance soutenue de préférence par un DJ, des petits gratouillis de gratte histoire de rendre l'ensemble trop zarb man, et le riff attendu pendant les 15 secondes règlementaires éclate. Et vas-y que j'te balance mon flow de ouf sur le couplet, que ça backin' vocalz à donf' derrière, et vas-y que j'te glisse une petite plage atmosphérique dans la gueule histoire de te monter que j'ai beau être un métalleux (doublé d'un MC), j'en suis pas moins sensible à la poésie man, surtout si elle est dark et urbaine t'as vu. Quant aux textes (pardon, aux lyrics man) je ne vais pas m'apesantir sur le sujet; c'est un étalage de revendications prépubères sur le non conformisme qui sauvera la planète, et même que si ça te plait pas, ben fuck off bro'.

Voilà, voilà. Y a encore du monde qui suit là ?

Bon parce que malgré tous ces lourds handicaps, et ben l'album éponyme d'(Hed) Pe il est pas si mauvais mes enfants. Au lieu de conserver la stricte assise metal/rap, le groupe explore des pistes en fonction de leurs influences, du rap West Coast donc, en passant par le reggae et le punk rock. Du coup, même si l'album est assez bordélique, comme tous les premiers album de ce genre, l'ensemble sonne assez frais et neuf en rapport aux productions de l'époque et le groupe se montre même parfois pertinent et original en balançant des morceaux pourtant ultra calibrés ("Tired Of Sleep").
Les musiciens font leurs jobs, ni plus ni moins, on a droit aux inévitables lignes de basses profondes et directes, aux scratches savamment placés et aux samples qui vont bien. Par contre la guitare est ici aigre et sonne beaucoup plus punk que metal. Pas de sept cordes à la Korn et de mur du son à la production, le son est plus brut bien qu'extrêment travaillé et quelques idées dans le mixage des morceaux arrivent à renouveller des structures rabâchées jusqu'à l'écoeurement("P.O.S.", "Ground", "Serpent Boy"...).

Drôle d'album, drôle de groupe donc. (Hed) Pe flirte régulièrement avec le succès sans toutefois exploser les charts, et de part son attitude farouchement indépendante garde un parterre de fans assidus. Une curiosité à bien des égards, mais finalement moins inattendue qu'elle ne veut bien le faire croire.


Correct   12/20
par Gérard Cousin


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