Chapelier Fou
Poitiers [Confort Moderne] - mercredi 15 avril 2009 |
Un costume un peu dépassé, très ample, un chapeau feutre ajusté sur la tête, voilà de quoi à l'air Chapelier Fou. A ses côtés un pc, un sampler, un clavier, une guitare et... un violon soigneusement installé dans son étui, prêt à bondir. Pas évident de passer avant Erik Truffaz. C'est ce que je pensais au début mais c'est sans compter sur le talent du garçon qui lui aussi a eu une formation classique avant de venir picorer dans le rock et se goinfrer d'électro. A peine arrivé derrière son attirail, Louis Warynski (c'est son vrai nom) lance la machine à chapeaux et allons-y tout de go: quelle claque ! Durant un peu moins d'une heure, le français revisite les travaux manuels comme ceux auxquels on a droit petit. Il bidouille son matériel (dont une partie doit être bricolée comme son joystick qui balance des crépitements), menuise ses samples, les agence, les ajuste, les malmène... Tout est fait dans la fécondité de l'instant présent, dans une aisance qui frôle l'insolence (dur de cacher ma jalousie) du beat décharné à la zébrure ultime de violon. Je pense particulièrement à "Trèfle" qui enchaîne un bourdonnement cyclothymique et une myriade de pizzicati. Quelle est donc la place de la musique dans tout ça ? Et bien elle est partout. Les ficelles que tient le garçon sont d'or mais elles le sont d'autant plus grâce à son sens aiguisé de la composition. Que le chapelier fasse ses collages en analogique ou en numérique, avec une ou une dizaine de pistes, le résultat est à chaque fois le même. Ca nous explose à la gueule, s'empare de nos sens qui sont autant triturés qu'une boucle perdue dans ce travail de composition. On n'est pas dans le fouillis mais dans une recherche inspirée, transcendée qui conduit à un travail d'une clarté et d'une intelligence remarquables, mis encore plus en exergue ce soir par la qualité du son irréprochable. Ainsi que ce soit courbé sur son ordinateur ou en train de plier durant une étreinte avec son violon, on s'émeut d'autant d'humanité dans cette électronique de haute volée: "Animaux Flexibles" aux syncopes épiques, "Superstitons" à la mélodie Nintendo qui se fait se faire brute ou furtive, et le fantastique "Capitaine Fracasse" casse effectivement tout mais de manière délicate, magnifique avec ce violon qui pleure. Ca me fait penser un peu à Sébastien Schuller, comme "Gramophone" labyrinthique. Et enfin "Darling, Darling, Darling...", tête à tête avec son instrument de conservatoire, sublime qui m'a chatouillé l'épine dorsale. Un concert splendide et intense. Chapeau bas.
Excellent ! 18/20 | par TiComo La Fuera |
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