Songs Of Green Pheasant
Aerial Days |
Label :
FatCat |
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Il y a de ces nébulosités qu'il fait bon d'observer. Debout, seul au petit matin, la tête légèrement inclinée en arrière, le menton pointé vers cet obscurcissement léger dû à ces nuages matinaux passant sans encombre et sans dire mot. Songs Of Green Pheasant est, semble-t-il, de ceux qui ont été imprégné par autant d'aurores et de paysages éblouis par ces lueurs pastel rosées qui nous font soudainement percevoir notre univers le plus proche différemment ("Pink By White"). A la manière des rayons lumineux qui détournent la vigilance de ces imposants nuages pour délivrer leur lumière d'espoir, Duncan Sumpner s'entoure d'un climat dépouillé totalement replié sur lui-même pour mieux diffuser son rock épuré spectral, désossé jusqu'à la moelle. L'écho d'une ligne de guitare perdue dans le fond, quelques notes de piano étouffées, basse et batterie basiques mais complètement occultées ("Wolf Amongst Snowmen"), l'anglais redéfinit les limites de la musique pastorale. Il soutire ses inspirations au folk pour en éclaircir davantage les formes et améliorer la portance de ces airs caduques ensommeillés par des soupirs d'un autre ordre. Baignant dans un mur de son immatériel indestructible fait de presque rien, Aerial Days franchit le pas du disque complètement retiré, quasi monacal. Les effluves malins ambiants y sont captés puis troqués en une mouvance incantatoire qui tient presque de l'ordre du divin, constamment érigé de sa plus haute posture. Et ces brumes insaisissables pourraient presque perdurer qu'avec le chant laconique de Sumpner. Car il est là le véritable pouvoir de Songs Of Green Pheasant. Cette voix énigmatique, fantomatique qui dérive en arrière plan et pourtant occupe tout l'espace. L'interprétation, qui a de sobriété que la douceur qui lui a été inculqué, est pour cela remarquable. "Remembering And Forgetting" me tient à cœur pour cette raison mais également parce que je connais le riff principal pour l'avoir composé une fois chez moi, bien avant de connaître ce morceau. Enfoncé dans mon canapé j'avais alors pour seul but d'épuiser toute la lenteur possible de mes quatre notes. Et puis je me suis acharné à chercher quelles autres lignes de guitare je devais greffer sur mon arpège principal, invitant sœur, pote ou guitariste croisé par hasard pour m'aider dans ma tâche. Impossible de trouver quelque chose de correct jusqu'à ce que Sumpner me montre que j'avais tort de vouloir ajouter quoi que ce soit d'autre. Des voix d'archanges superposées placées en trame suffisent et même transcendent le reste qui finissait par faire friser mes cordes. L'aérien au service de la lévitation spirituelle se consume ainsi dans les voiles indigents mais salutaires du faisan vert de Sheffield et s'engouffre même dans le populaire "Dear Prudence" des Beatles. La portée d'une œuvre aussi discrète et pourtant complète qu'est Aerial Days semble sans précédent, prise dans des bouquets opales d'aubes ou même d'origines du monde comme le magnifique "Brody Jacket" qui tente de perdurer jusqu'à la dernière seconde. La définition même de la plénitude.
Parfait 17/20 | par TiComo La Fuera |
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